Les MOOC ont-ils encore un avenir dans la formation professionnelle ?

Merwan Maroc
6 Octobre 2025
10 minutes
Une femme suit un MOOC sur son ordinateur

À leur apparition au début des années 2010, les MOOC ont été accueillis comme une révolution. Massifs, ouverts, souvent gratuits, ils promettaient d’ouvrir l’accès au savoir au plus grand nombre, et de transformer durablement les pratiques de formation, y compris dans le monde de l’entreprise.

Dix ans plus tard, leur usage semble s’être stabilisé, voire marginalisé dans certains contextes professionnels. Faible taux de complétion, manque de personnalisation, absence d’accompagnement : les critiques n’ont pas manqué, et d’autres formats ont émergé pour y répondre.

Mais les MOOC ont-ils vraiment dit leur dernier mot dans la formation professionnelle ? Ou ont-ils simplement changé de rôle ?

Cet article est le premier de notre série de la rentrée qui vise à faire le point sur les formats digitaux nés dans les années 2010, qui ont marqué l’essor de la formation en ligne. MOOC, SPOC, COOC, FOAD… quels usages en reste-t-il aujourd’hui ? Qu’ont-ils permis ? Et que peuvent-ils encore apporter ?

Les MOOC : genèse, promesses et essor fulgurant

D’où viennent les MOOC ?

L’acronyme MOOC signifie Massive Open Online Course, soit "cours en ligne ouvert et massif". Le concept apparaît au tournant des années 2010, à la croisée de deux dynamiques : l’évolution des technologies d’e-learning, et une volonté des universités de démocratiser l’accès au savoir à l’échelle mondiale.

Les premiers MOOC sont nés dans les milieux universitaires nord-américains, portés par des institutions comme le MIT ou Stanford. L’idée était simple mais ambitieuse : proposer en ligne, gratuitement et à grande échelle, des cours jusque-là réservés à un public restreint.

C’est dans ce contexte que des plateformes comme Coursera, edX ou Udacity ont vu le jour. En France, l’initiative publique FUN (France Université Numérique) a joué un rôle majeur, en fédérant les établissements d’enseignement supérieur autour d’un catalogue de MOOC francophones.

Le format séduit rapidement : accessibilité, flexibilité, diversité des sujets… les inscriptions explosent. C’est l’époque où l’on parle de "révolution du savoir", où l’on prédit que les universités physiques pourraient être dépassées par ces modèles en ligne.

Une révolution annoncée

À leur lancement, les MOOC apparaissent comme une réponse aux limites structurelles de l’enseignement traditionnel : ils promettent de toucher des milliers, voire des millions d’apprenants simultanément, à moindre coût.

Leur promesse repose sur trois piliers :

  • L’ouverture : pas de barrière à l’entrée, n’importe qui peut suivre un MOOC.
  • La massivité : des milliers de participants peuvent apprendre en parallèle.
  • La souplesse : on apprend quand on veut, où on veut.

Très vite, les MOOC couvrent une grande variété de thématiques : mathématiques, marketing digital, développement web, sciences humaines, soft skills… Ils deviennent également un levier de montée en compétences pour les personnes en reconversion, ou en complément d’études.

En France, FUN-MOOC s’impose comme la plateforme de référence. Portée par le Ministère de l’Enseignement Supérieur, elle regroupe des universités, des écoles de commerce et des grandes écoles publiques. Des acteurs comme OpenClassrooms adaptent aussi le modèle MOOC à un public plus large, avec un format certifiant et professionnalisant.

L’entrée dans le monde professionnel

Face à l’engouement du grand public, les entreprises commencent à s’intéresser aux MOOC dès le milieu des années 2010. Beaucoup y voient un moyen rapide et économique de former un grand nombre de collaborateurs, sur des compétences transverses ou émergentes.

Des MOOC dédiés à la cybersécurité, au RGPD, à la communication interpersonnelle, ou aux fondamentaux du management sont intégrés dans les offres de formation internes ou proposés en libre accès sur les plateformes partenaires.

L’intérêt est double :

  • Standardiser certaines connaissances à grande échelle, rapidement.
  • Valoriser la culture de l’auto-formation, en donnant accès à un large éventail de contenus.

Des entreprises françaises commencent même à développer leurs propres MOOC, ou à co-construire des parcours avec des partenaires académiques. Le format semble cocher toutes les cases de l’efficacité digitale : souplesse, autonomie, réduction des coûts.

Mais cette adoption rapide masque aussi certaines fragilités. Si le MOOC ouvre des possibilités, il montre aussi très vite ses limites d’impact sur le terrain, que nous aborderons dans la partie suivante.

Limites du format : pourquoi les MOOC ont perdu en popularité en entreprise

Si les MOOC ont rapidement séduit par leur promesse de massification et d’ouverture, leur usage en entreprise a vite montré ses limites. Le format, pensé initialement pour l’enseignement supérieur, s’adapte difficilement aux réalités du monde professionnel. Plusieurs freins structurels expliquent pourquoi les MOOC, après avoir suscité l’enthousiasme, sont aujourd’hui moins utilisés dans les dispositifs de formation internes.

Une logique trop descendante et peu contextualisée

Les MOOC reposent sur une logique de diffusion de contenu, souvent construite autour de vidéos longues, de cours magistraux enregistrés et de quizz d’évaluation. Si ce modèle peut convenir à un étudiant en quête de concepts théoriques, il s’avère peu engageant pour un collaborateur en poste.

Le contenu est le même pour tous, quel que soit le secteur, le niveau d’expérience ou le contexte de travail. Cette absence de personnalisation limite l’impact : les apprenants ne s’y retrouvent pas, et ne voient pas toujours le lien entre le module suivi et leur quotidien professionnel.

L’autre limite, c’est l’absence de lien avec l’environnement métier. Les MOOC restent souvent très génériques, déconnectés de la réalité opérationnelle. Résultat : peu de transfert des acquis vers la pratique, et une difficulté à maintenir l’attention au-delà des premières sessions.

Un engagement très faible

C’est le grand point noir des MOOC : les taux d’abandon sont extrêmement élevés. Plusieurs études estiment qu’en moyenne, moins de 10 % des inscrits terminent effectivement le cours. Sur certaines plateformes ouvertes, le taux de complétion tombe même à 5 %.

Plusieurs raisons expliquent ce phénomène :

  • L’apprenant est seul face au contenu, sans accompagnement ni suivi.
  • Il manque de motivation intrinsèque, notamment si le MOOC n’est pas intégré dans un vrai parcours structuré.
  • Le format est souvent trop long et peu interactif, ce qui rend difficile l’engagement dans la durée.

En entreprise, cela pose un vrai problème : les services formation investissent dans des contenus, mais n’observent que très peu de résultats concrets. Le manque de pilotage, de tutorat ou de dynamique collective transforme souvent le MOOC en ressource passive.

Un format inadapté aux usages professionnels

Les MOOC traditionnels sont conçus pour des séquences longues : plusieurs heures par semaine, sur plusieurs semaines. Or, ce format s’oppose aux contraintes de temps des collaborateurs. Ils disposent rarement de créneaux prolongés pour se former, surtout dans les secteurs opérationnels comme le retail, la logistique ou la restauration.

De plus, la majorité des MOOC restent peu optimisés pour le mobile, alors que de plus en plus d’apprenants consomment la formation sur leur smartphone, entre deux tâches. Le format est donc en décalage avec les nouveaux usages digitaux : microlearning, formats courts, expérience mobile-first, modularité.

Ce décalage entre format et réalité explique pourquoi les MOOC, malgré leur qualité de fond, peinent à s’inscrire durablement dans les stratégies de formation en entreprise.

Quel avenir pour les MOOC dans la formation professionnelle ?

Malgré leurs limites, les MOOC n’ont pas totalement disparu des dispositifs de formation. Leur usage a simplement évolué. Moins mis en avant comme une solution miracle, ils sont aujourd’hui réintégrés dans des stratégies plus nuancées, en complément d’autres formats plus engageants et personnalisés. Alors, quel rôle peuvent encore jouer les MOOC en entreprise ? Ont-ils un avenir ? Et sous quelle forme ?

Ce que les MOOC ont permis malgré tout

Il serait injuste de réduire les MOOC à un échec. Leur arrivée a marqué une vraie transformation dans les pratiques de formation :

  • Ils ont démocratisé l’accès à des contenus de qualité, auparavant réservés à certaines écoles ou institutions.
  • Ils ont initié une culture de l’auto-formation chez de nombreux apprenants.
  • Ils ont mis en lumière l’intérêt du digital pour former à grande échelle, dans une logique ouverte.

Dans certaines entreprises, les MOOC restent utiles pour diffuser des fondamentaux : culture générale digitale, bases de la cybersécurité, notions clés en développement durable ou en droit du travail. Leur coût réduit et leur accessibilité en font des ressources pertinentes pour constituer un socle commun de connaissances.

Vers une transformation du format

L’avenir du MOOC ne passe sans doute pas par le format original des années 2010, mais par des adaptations plus souples, plus intégrées et plus ciblées. Plusieurs évolutions sont déjà visibles :

  • Des MOOC plus courts, découpés en micro-modules, intégrés à des parcours blended ou à des plateformes LMS/LCMS.
  • Un accompagnement plus systématique : tutorat, forums actifs, sessions synchrones.
  • Une scénarisation plus soignée, pour sortir du "cours filmé" et proposer une vraie expérience d’apprentissage.

Certains organismes reconfigurent même des MOOC pour en faire des parcours de certification plus engageants, avec des évaluations intermédiaires, des badges ou des livrables concrets à produire.

Ce "MOOC 2.0", plus pragmatique, moins dogmatique, pourrait ainsi retrouver une place utile dans les écosystèmes de formation, à condition d’être articulé avec d’autres formats.

Le rôle du MOOC dans l’écosystème digital de 2025

En 2025, la formation en entreprise est profondément hybride, modulaire et mobile. Dans cet environnement, les MOOC ne sont plus la pièce maîtresse, mais un maillon parmi d’autres :

  • Utile pour introduire une thématique, poser un cadre, ou servir de base théorique.
  • À combiner avec du microlearning, de la formation mobile, ou des parcours sur mesure comme les SPOC.
  • À intégrer dans des logiques de blocs de compétences, avec des passerelles vers d’autres formats plus engageants.

Les MOOC peuvent aussi jouer un rôle intéressant dans des logiques d’open learning, notamment pour les collaborateurs qui souhaitent aller plus loin, sur un mode volontaire. Dans cette perspective, ils deviennent des ressources optionnelles, enrichissantes, mais non centrales.

🧩 Une série à suivre…

Cet article est le premier de notre série de la rentrée consacrée aux formats digitaux apparus au début des années 2010, et qui continuent d’influencer les pratiques actuelles.

Dans les prochaines semaines, nous aborderons :

Chacun de ces formats offre une réponse différente à un besoin spécifique. L’enjeu, désormais, est de les articuler intelligemment dans une stratégie globale de formation.

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