Dans les années 2010, les COOC (pour Corporate Open Online Courses) ont été présentés comme la déclinaison “grande entreprise” des MOOC. Le principe ? Proposer des parcours de formation en ligne, à grande échelle, mais produits et diffusés par l’entreprise elle-même. Une manière de garder le contrôle sur les contenus, tout en assurant une large diffusion des messages clés : culture d’entreprise, vision stratégique, procédures, posture managériale…
De nombreux grands groupes ont alors investi dans ce format, séduits par sa capacité à allier maîtrise du discours, modernité du canal et valorisation de leur marque employeur. Le COOC était vu comme un levier puissant pour transformer la formation interne, sans passer par des contenus génériques.
Mais en 2025, alors que les usages ont changé, que les formats courts, mobiles et individualisés dominent les pratiques, le COOC garde-t-il sa pertinence ? Est-il encore une réponse adaptée aux besoins de formation actuels, ou fait-il partie de ces formats à réinterroger ?
Cet article est le troisième volet de notre série de la rentrée, qui propose un retour critique sur les formats digitaux qui ont marqué l’essor de la formation en ligne au cours des années 2010.
Après avoir interrogé l’avenir des MOOC et analysé les atouts et contraintes des SPOC, nous nous penchons aujourd’hui sur les COOC : ce qu’ils ont permis, ce qu’ils laissent derrière eux, et la place qu’ils peuvent encore occuper dans un dispositif moderne de formation.
Qu’est-ce qu’un COOC ?
Origine et définition du format
Le COOC, acronyme de Corporate Open Online Course, désigne un format de formation en ligne conçu et diffusé par une entreprise, à destination de ses collaborateurs, partenaires ou clients. À la différence du MOOC, ouvert à tous et souvent produit par des universités, le COOC est pensé pour répondre aux besoins internes d’une organisation, dans un cadre maîtrisé.
Le terme apparaît au début des années 2010, dans la foulée du succès des MOOC. À l’époque, les entreprises perçoivent rapidement l’opportunité d’utiliser ce type de format pour transmettre leur culture, former à leurs outils, ou accompagner la transformation en interne. Le COOC devient alors un moyen de digitaliser des formations “corporate” à grande échelle, tout en gardant un contrôle total sur les contenus et les messages.
Objectifs initiaux du COOC
Les COOC sont rapidement adoptés dans des contextes très variés :
- Formation interne : onboarding des nouveaux collaborateurs, montée en compétence sur des process, déploiement de projets stratégiques.
- Communication managériale : partage de vision, alignement autour des valeurs de l’entreprise, déploiement d’une culture managériale.
- Formation externe : sensibilisation de partenaires, formation des franchisés, accompagnement des distributeurs ou des clients.
Le COOC a ainsi été vu comme un outil de transformation à grande échelle, capable de faire passer des messages clés à des milliers de personnes, avec une homogénéité et une rigueur difficile à atteindre autrement.
Exemples d’entreprises ayant utilisé des COOC
En France, plusieurs grands groupes se sont rapidement emparés du format. On peut notamment citer :
- L’Oréal, qui a lancé des COOC internes pour former ses managers aux enjeux RH et culturels du groupe.
- BNP Paribas, qui a proposé des parcours en ligne sur la transformation digitale ou la cybersécurité à l’ensemble de ses équipes.
- Orange, qui a intégré des COOC dans sa stratégie de conduite du changement, avec des modules scénarisés sur l’innovation ou la posture client.
Ces initiatives ont souvent été portées par des plateformes spécialisées ou des prestataires capables de produire des contenus vidéos, des modules interactifs, et de créer des environnements immersifs alignés avec l’identité de marque.
Ce que le COOC a permis (et permis de dépasser)
Même si les COOC ont perdu en popularité aujourd’hui, ils ont occupé un rôle important dans l’évolution de la formation professionnelle. Pour de nombreuses entreprises, ils ont été la première étape vers une digitalisation structurée de la formation, avec un objectif clair : diffuser un message cohérent, maîtrisé, et à grande échelle. Avant l’essor des formats mobiles, courts et individualisés, le COOC représentait une avancée majeure.
Structurer des formations à grande échelle
L’un des apports majeurs des COOC, c’est leur capacité à standardiser la diffusion de messages stratégiques dans des organisations complexes. Dans les grands groupes, où les équipes sont nombreuses, réparties sur plusieurs sites ou pays, il était souvent difficile de faire passer des consignes ou des formations de manière homogène.
Le COOC a permis de répondre à cette problématique en proposant des parcours en ligne :
- pour accueillir les nouveaux arrivants,
- pour diffuser des messages managériaux communs,
- ou pour accompagner des projets de transformation à l’échelle de l’entreprise.
Même s’il s’agissait d’un format descendant, il avait le mérite d’instaurer une base commune, avec un message clair, des contenus maîtrisés, et une structure pédagogique cohérente.
Valoriser la marque employeur et la culture d’entreprise
Au-delà de l’objectif purement pédagogique, les COOC ont aussi été utilisés comme outils de communication interne et externe. Bien conçus, ils permettaient de refléter l’univers visuel de l’entreprise, ses valeurs, sa culture… et de valoriser son expertise.
Certains COOC ont même été rendus publics ou semi-publics, dans une logique de rayonnement externe : former des partenaires, sensibiliser les clients ou attirer des candidats. Ce double usage, formation + marque employeur, a été un vrai levier pour plusieurs grandes entreprises cherchant à affirmer leur position sur des sujets comme l’innovation, le digital, ou la responsabilité sociétale.
Proposer des parcours qualitatifs, mais sous contrôle
Autre avantage souvent souligné : la qualité de production et de scénarisation. Contrairement à de simples modules e-learning, les COOC donnaient lieu à des formats souvent plus immersifs : vidéos soignées, témoignages internes, quizz dynamiques, storytelling, forums…
Cela permettait de créer des parcours cohérents, engageants, et alignés avec l’univers de l’entreprise. Le contenu était plus vivant, plus incarné, et surtout aligné à 100 % avec les messages que l’entreprise souhaitait transmettre.
Pourquoi ce format est de moins en moins utilisé aujourd’hui
Les COOC ont représenté une avancée importante dans la digitalisation de la formation professionnelle, mais leur usage s’est progressivement réduit au fil des années. Le contexte a changé, les outils ont évolué, et les attentes des apprenants aussi. En 2025, de nombreuses entreprises préfèrent des formats plus agiles, plus courts, plus intégrés à leur quotidien. Voici pourquoi.
Un format trop rigide pour des besoins évolutifs
Concevoir un COOC demande un investissement conséquent : temps de production, ressources vidéo, scénarisation pédagogique, animation éventuelle… Or, une fois produit, le parcours est souvent difficile à ajuster rapidement. Modifier un COOC prend du temps et coûte cher, surtout si l’on veut rester cohérent sur le fond et la forme.
Dans des environnements où les compétences attendues évoluent très vite, numérique, retail, réglementaire, etc., la rigidité du COOC devient un frein. Ce format n’est pas conçu pour être itératif, réajusté en temps réel ou enrichi en fonction du retour des apprenants.
Une approche encore trop descendante
Même si certains COOC intégraient des forums ou des QCM, la majorité reste construite sur une logique descendante : le savoir est diffusé depuis un centre vers des apprenants “récepteurs”. Ce modèle, hérité de la formation académique, ne répond plus aux attentes actuelles en matière d’apprentissage.
Aujourd’hui, les apprenants recherchent des formats :
- plus participatifs,
- plus proches de leur réalité terrain,
- plus intégrés à leur rythme de travail.
Le COOC, avec ses modules longs et ses séquences planifiées, peut sembler déconnecté, voire pesant dans des contextes où la souplesse est devenue essentielle.
Des alternatives plus agiles, plus compatibles avec les usages 2025
Face à ces limites, d’autres formats ont émergé, mieux adaptés aux contraintes actuelles : le microlearning, le mobile learning, ou les parcours hybrides mêlant présentiel, capsules courtes et accompagnement. Ces formats permettent :
- des mises à jour rapides,
- une diffusion multi-appareils, y compris sur mobile,
- un apprentissage en continu, intégré au quotidien.
Ils ne visent pas à remplacer les COOC sur tous les terrains, mais à offrir une alternative plus fluide, plus engageante, et surtout plus durable dans le temps.
Dans ce contexte, les COOC ont perdu en pertinence. Non pas parce qu’ils sont obsolètes, mais parce qu’ils ne répondent plus pleinement aux exigences de réactivité, de personnalisation et d’impact immédiat que recherchent les entreprises aujourd’hui.
🧩 Une série à suivre…
Le COOC a marqué une étape importante dans la digitalisation de la formation en entreprise. Il a permis de structurer des messages, de diffuser des contenus à grande échelle, et de renforcer la culture d’entreprise par le biais de parcours homogènes et maîtrisés. Mais son format, conçu pour les usages et les infrastructures des années 2010, montre aujourd’hui ses limites face aux nouveaux standards d’agilité, de personnalisation et d’ancrage terrain.
Ce troisième volet de notre série de la rentrée s’inscrit dans une démarche plus large : revenir sur les formats qui ont façonné la formation digitale au cours de la dernière décennie, pour mieux comprendre leur rôle, leurs apports, et leurs points de friction dans un contexte professionnel en pleine mutation.
À retrouver également :
- MOOC : ont-ils encore un avenir dans la formation professionnelle ?
- SPOC : moins de monde, plus d’impact ?
- FOAD : la formation ouverte à distance a-t-elle encore un sens en 2025 ?